Dix ans d'absence

Je remonte le temps en faisant cliquer la molette de la souris. Les titres des posts défilent.
Dix ans. Peu et beaucoup. Assez pour tout changer. Année 2006. Etait-ce le début de quelque chose? Peut-être le début de la stabilité, tout simplement. Un appartement. Un job. De quoi voir venir, comme on dit.
Je n'ai jamais retrouvé la légèreté de ton des premières pages. Celles qui datent de nos échanges de mails avec Carole, transposés ici. Ce n'était peut-être pas une bonne idée, ensuite, de m'approprier cet outil pour en faire ce qu'il est devenu – en clair, mon ouvrage. Mais je ne veux ni m'interroger, ni disserter sur les raisons (sans doute narcissiques, sans doute exhibitionnistes) qui m'ont poussé à agir de la sorte. L'idée était je pense d'avoir un public. Même petit. Ecrire pour autrui, pour des personnes que je ne connaissais pas, en fait. M'obliger aux stimulantes contorsions auxquelles il faut se livrer pour dire les choses sans se dévoiler totalement.
Je ne retrouverai pas non plus, je pense, la légèreté de l'époque. Elle est perdue parce que j'ai, tout simplement, pris dix ans. J'ai compris un certain nombre de choses. Mais je me suis assez exprimé sur ce sujet récemment; je ne vais pas ressasser.
Il y a dix ans, je pouvais encore rêver mon futur. Le futur que l'on conçoit avant quarante ans est, en fait, un futur du court terme. Maintenant, cet avenir est dévoilé. S'il est décevant, je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. Mais il ne l'est pas, au fond. C'est juste que la suite n'a plus guère de mystère. On joue avec les cartes qu'on a en mains. A moins, bien sûr, d'un accident du destin...

Je m'habitue à prendre les personnes et les choses comme elles sont, plutôt que d'espérer qu'elles deviennent comme je désirerais qu'elles soient. Je réalise le gâchis que cette posture m'a coûté, dans les relations, dans la vie en général. Par rapport aux autres, par rapport à moi-même. Cette attitude a engendré nombre de déceptions. Je me suis attendu là où je n'étais pas, là où je n'avais rien à faire. J'ai mentalement assigné aux autres des rôles qui n'étaient pas faits pour eux. Le fait qu'ils ne jouent pas le jeu attendu m'a parfois même mis en colère contre eux. Aussi, j'ai surévalué certaines choses. Le sexe, par exemple. Comme s'il recelait une panacée contre différents maux. Comme si sa pratique, selon des codes précis (et totalement fantasmés), me procurerait les clés du Nirvâna. J'ai confondu ce théâtre avec la réalité. C'était forcément une source de déceptions répétées. C'était idiot, mais je n'avais pas conscience de ceci.

Ces dernières semaines, Pascal m'a aidé à agrandir le salon (le petit bureau n'existe plus), à repeindre quasiment tout l'appartement. Il faut que je m'habitue à ce nouvel espace. Je ne l'ai pas encore complètement apprivoisé. Je me sens un peu perdu dans le canapé. Samedi, j'ai écrémé ma bibliothèque qui débordait, jeté des kilos de livres, des ouvrages inutiles que je traîne depuis vingt ans et plus. J'ai vidé et nettoyé chaque étagère: derrière les bouquins, des nappes de poussière agglomérée – vieille de dix ans, justement. Me voilà donc bien installé. Le travail: un quotidien bien rôdé, bien huilé, sans grand problème. J'ai quelqu'un dans ma vie; de bons amis. De quoi assurer pour les dix prochaines années, en somme.

Il y a dix ans:
Etat des lieux

Articles les plus consultés