Gran Via


Vers le huitième kilomètre environ, comme nous virions à droite, j'ai fini par enclencher l'iPod. Les premières notes de Moonsmith ont résonné dans mes oreilles; et le rythme de ce morceau s'est immédiatement accordé à celui du moment: celui d'une rivière humaine qui s'étalait, tranquille, entre les berges hautes de la Gran Via. Les silhouettes de mes voisins oscillaient au rythme de leur foulée, sous le ciel gris — tandis qu'au-dessus de nos têtes fumantes, des rangées successives de feux rouges n'arrêtaient rien ni personne. Les phrases psalmodiées de l'introduction ont alors fait place aux cuivres, auxquels répondaient, par vagues, des choeurs; et tout était parfait.
Il faut finir de traverser, je pense, ce temps mort, terreau d'indécision. Attendre que l'étreinte du froid, qui harcèle jusqu'à Barcelone (exception faite d'un moment de grâce, à mon arrivée, sous un petit soleil gaillard qui carressait la terrasse du Zurich) se relâche enfin. Tenir bon, peut-être encore dix jours.


Lire aussi
Le collier du Poulet

Articles les plus consultés