Un acte manqué


"Voici la mi-été / Bergers de nos montagnes / Compagnons et compagnes, que ce jour soit fêté / Voici la mi-été / Voici la mi-été"Ce refrain populaire des Alpes vaudoises que l'on nous apprenait en classe de chant n'a pas de pendant hivernal. A part ressasser "Vive le vent d'hiver" au temps des rengaines de Noël, quand l'esprit général est plus ou moins à la fête, personne n'a le cœur de célébrer par des chants le lent déroulement de la mauvaise saison, une fois passées les festivités du Nouvel-An. Fin janvier, ce serait pourtant bien le moment de célébrer une "mi-hiver". Mais au mitan de la saison froide, le moment ne semble pas propice à la naissance d'un chant de joie. Même si les jours s'allongent, même si la lumière reprend lentement ses droits, la température stagne autour de zéro. La rue reste inhospitalière. Demeure l'impression d'être dans un creux, un temps figé. Quelque part, un poids leste la mécanique, l'empêche de reprendre sa marche normale. Une tristesse passagère...
Samedi, journée dégagée, limpide, l'après-midi idéal pour un jogging. La boucle habituelle. Je me sens rouillé, vieux; de petites douleurs au bas des reins, derrière le genou gauche. Je pense qu'une obligation de type amical, en soirée, me fait louper la
Mitja de Barcelone. Il y fera sans doute fait moins froid que l'an dernier... Sinon, je serais également bien allé au concert de Kruder & Dorfmeister au Volkshaus de Zurich. Et tiens, je me serais bien vu m'encanailler un peu au Rage, aussi... On ne peut hélas pas tout faire, et je n'ai pas le don d'ubiquité.
Un peu plus tôt dans l'après-midi, un tchat avec M* de Berlin. Il est question de nous revoir en février. Les messages se succèdent. Je clique sur le dernier arrivé. Il commence par "Lieber Stephan"; suivent des considérations techniques sur le déroulement d'une future session, qui ne devrait pas forcément être "aussi extrême" que la dernière en date... J'ai un moment d'hésitation. A-t-il écrit le mauvais prénom en tête d'un message qui s'adresse effectivement à moi? Ou m'a-t-il, plus vraisemblablement, envoyé par erreur le message destiné à ce Stephan? Je vérifie: c'est bien cela. Cet acte manqué suscite un grand embarras chez mon correspondant: envoi de smileys indiquant la confusion, paroles de regrets, témoignages d'affection... Rien de grave évidemment. Mais ce qui me surprend le plus dans cette affaire, c'est de voir qu'il entretient avec ce "très ancien ami du voisinage" une correspondance détaillée sur les jeux sexuels, alors même que je suis allé le voir trois fois sans que nos pratiques, au demeurant assez techniques et compliquées, ne fassent jamais l'objet de d'arrangements écrits préalables, même avant ma première visite.
Je ne sais pas trop ce qu'il faut en déduire.

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