Jours uniques, jours ordinaires...

Que faisiez-vous ce matin à 11 heures 11? Pour ma part, j'assistais à une réunion, improvisée dans une pièce mal adaptée. Des personnes étaient debout, quelques unes, dont j'étais, assises sur des chaises. Des chaises de bureau. Cette minute est passée, personne ne s'en est rendu compte. Ensuite il a fallu aller ailleurs, faire autre chose, entendre d'autres discours et voilà: l'instant numéroté 11.11.11 – 11:11 était passé.
Cette date-là ne me laissera pas un souvenir indélébile. Je me suis levé à 5h15 ce matin pour des raisons professionnelles, avec un début de lumbago dû au stress de la veille. J'ai avalé un anti-inflammatoire avant mon premier café, après une mauvaise et courte nuit. Et aujourd'hui le soleil ne s'est quasiment pas montré.
Pareillement, je serais incapable de vous dire ce que je faisais le 9.9.99. Je pourrais aller à la cave, fouiller dans un carton et retrouver l'agenda de cette année-là car je me soupçonne de l'avoir conservé. Un gros agenda carré, recouvert de moleskine, une semaine sur deux pages, l'agenda de mon travail. Un travail alors bien ennuyeux. Je me souviens de cette année-là comme d'une année extrêmement laborieuse justement. Une ambiance difficile, limite conflictuelle. Je devais alors me familiariser avec des procédures qui me semblaient kafkaïennes: on faisait telle chose comme ceci chez Madame Truc, on la faisait comme cela à l'étage d'en-dessous, chez Monsieur Machin. Il fallait le savoir. On se répartissait dans des locaux bancals, reliés par des passages inattendus, des escaliers, qui joignaient en un site plusieurs immeubles du XVIIe siècle. Ce jeudi-là n'était certainement pas un jour extraordinaire, hormis l'originalité de la date...
Pareillement encore, je ne pourrais pas dire ce que je faisais le 7.7.77. Je suppose que j'étais en vacances à Cossonay. Ce n'était plus l'été de la canicule, mais celui d'après. Nous devions être en promenade avec le Pépé. Au bois du Sépey. Ou bien alors "sous les dailles". Ou bien à l'Hôtel de la gare, où je martyrisais le flipper. Ou alors, j'étais chez Jacky...
En revanche je me souviens assez précisément du 8.8.88. Nous venions de débarquer à Varsovie, avec Gérald. La veille, Lech nous avait accueilli dans l'appartement de son ami Marek. Un studio gris dans une ville grise et sans attrait. Nous avions mal dormi, tous les trois côte à côte sur un canapé-lit. Le drap ne recouvrait pas complètement le matelas et je me souviens que le contact de mon visage avec le coutil douteux me dégoûtait un peu. Une baie vitrée ouvrait sur un balcon, au-dessus d'une de ces longues avenues de Varsovie, entrecoupées de ronds-points. La ramure des arbres faisait comme un tunnel, sous lequel grinçaient de vieux tramways rouge foncé. Je me souviens de la pleine lune au-dessus des arbres, la première nuit. Ce 8 août, en quittant l'appartement, j'ai photographié Gérald sur la galerie, de l'autre côté de l'immeuble, en lui disant: "On se souviendra de cette photo à cause de la date". Mais je doute qu'il s'en souvienne, pour sa part.
Attends de voir les merveilles que nous réserve le 12.12.12...

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