Une tempête


Dans l'après-midi, l'air chargé de pluie se met à fouetter les vitrages. De la terrasse, on entend le choc répété des pots qui se soulèvent et retombent en frappant les dalles; des raclements de choses traînées par le vent. C'est à ce moment là que tu arrives. Le ciel noir se fend brutalement d'une éclaircie qui inonde tout d'une lumière violente et blanche. Les cieux sont en chamaille: un moment, c'est la nuit; un autre, la lumière reflue et éclabousse tout. L'air siffle, des vents coulis s'insinuent entre la muraille et le cadre des fenêtres, ou dans les caissons des stores. Le magnolia s'est renversé. Là bas dans les embarcadères, l'éclat régulier des balises lumineuses affolées. Les vitres ruisselantes vibrent sous les rafales. Plus tard, le verre armé de la balustrade éclate d'une pluie d'or, rapidement dissoute par l'assaut d'une nouvelle et définitive vague d'encre qui amène le soir, puis la nuit.
Nous nous découvrons. Je sens des flux, des reflux, des connivences, un accord; quelque chose qui  se met à circuler. Sur un tapis de notes électriques, des voix aériennes commencent à fredonner. Des portes s'ouvrent. Voici un peu d'air frais. Tout paraît possible. L'année débute maintenant. Par une brèche de ciel bleu qui fait brièvement danser des disques de lumière sur un lac de cobalt, je vois passer un Rat généreux en route vers ailleurs. Dans ton dos, je lui adresse un signe de la main. Merci pour tout, compañero. Au revoir.

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