Talapan Plage


Il fait bien 30 degrés quand je monte dans l'omnibus pompeusement appelé RER. Dans le wagon transformé en four, je fais brusquement monter la moyenne d'âge qui ne doit pas atteindre 18 ans. Cette jeunesse n'a pas connu les petites maisons ouvrières qui bordaient autrefois la gare lorsque la voie 8, où nous stationnons, dominait de modestes toitures piquetées de cheminées. Cette frange nord de la rue du Simplon a fait place au parking et à une voie supplémentaire.
Le train s'ébranle. Une composition vieillotte, bruyante, qui vibre et tressaute. Les fenêtres ne s'abaissent pas, mais on peut faire coul
isser des impostes qui font claquer les stores comme autrefois. A Renens, des voyageurs se ruent hors du métro pour s'engouffrer entre les portières jaunes de notre train. Les enseignes de toujours longent la voie: l'atelier de chromage dur, Baumgartner Papiers; et à Bussigny, les entrepôts de ferraille Nell - qui me rappelaient à chaque fois le jass que m'enseignaient mes grands-parents... "Sta-Fil" et "Vulcain" ont disparu. Le train repart. La ville fait place aux champs, aux bois. On ignore Vufflens et voilà déjà Cossonay où le train penche, à l'arrêt, rapport à la courbe de la ligne.
Après le pont, je coupe par le talus et trouve le chemin de la piscine. Deux jeunes pêcheurs en bottes dans une Venoge verte, avare, aux relents d'égouts. Déjà les cris, le bruit des plongeons. Mon entrée payée, je me rends compte que les vestiaires ont été déplacés. L'espace déjà restreint est barré de vilaines clôtures en treillis. Le gaz
on est moins pelé qu'en 2003, quand nous étions venus avec Ig. Je trouve deux mètres carrés au soleil pour m'étendre, et une trouée dans le bassin pour plonger. Le béton à peinture ocre qui l'entourait a fait place à une bordure rugueuse moins flashy. Mais le plongeoir triangulaire jaune et bleu est toujours là, comme les couleurs vives des bâtiments des vestiaires et du café. La piscine est minuscule! Je repense à la "grande traversée" que mon père m'avait faite faire, un après-midi, sur ses épaules... Quinze mètres, à peine! Je lis, j'écoute de la musique, je mange un café glacé, je replonge et puis j'en ai assez. Voie 2, la vieille guérite de bois des sinistres dimanches soirs est encore là, avec son panneau en lettres capitales. Le distributeur de billets hors service, je resquille jusqu'à Renens où je prends le 7 devant la maison ronde, où les Turcs me vendent un café au parfum exotique.

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