Winterreise


Mercredi, 16 heures. Quelques messages échangés avec Denis, encore à Salvador. En prévision de la venue de A. vendredi, j'ai soudain l'idée de tester l'assome-chien (un type m'en a proposé dimanche, de manière impromptue). Je tape probablement un peu trop le pumper, provoquant une grande concentration de cristaux dans le godet. Voici ma narine, mes sinus en feu; l'impression d'avoir sniffé le paquet de lessive. Dix minutes passent, et voilà que je me démantèle sous l'effet de l'anesthésiant. Effondré sur le divan rouge du bureau, je distingue mes pieds à 2 kilomètres. Mon corps est animé de mouvements compulsifs, qui servent à maintenir un contact avec la réalité: je frotte mes orteils contre mes semelles rugueuses, j'entrechoque mes cuisses; dans ma bouche, je fais rouler une salive épaisse. Mais entre ma tête et mes pieds, une impression de vide remplace mon corps. Par la fenêtre, un temps de giboulées fait varier la lumière, me projetant tantôt dans une irréelle blancheur hivernale, tantôt dans une atmosphère plus jaune, plus gaie. Je me force à me lever pour rassurer Denis, averti de cette "dégustation". Il me faut pour cela basculer sur les genoux, puis ramper jusqu'au PC. Le pointeur de la souris à laquelle je m'agrippe parcourt des kilomètres sur un écran distendu. Je ne vois bien qu'avec l'oeil gauche, je ne tape qu'avec un seul doigt, au prix d'une concentration énorme. Je regarde l'heure (16 h 23) et je pense: merde, encore 50 minutes à supporter cette situation ridicule...

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