Feed my head


Un après-midi au bord du lac, dans un quadrilatère de gazon balisé par les rainbow flags qui claquent au vent. Ambiance Rio sur Limmat, parties de cartes, cafés, glaces, DJ's pour le fond sonore chill out. La dolce vita. Le soir nous prenons un bus pour le Rage. Ambiance sportive, shorts satinés et chaussettes de foot. Je comprends assez vite que rien ne se passera. Au bar du sous-sol, je rencontre B., vu à Bienne. Le revoir confirme mon intuition: la magie de notre fin de nuit sur une pelouse ne se répètera pas. Vers une heure, nous montons dans un taxi pour retrouver ce bon vieux Laby. Plaisir de s'asseoir dans le salon du haut, jambes coupées par le souffle de la lente explosion qui envahit la tête. Regarder les fractales se déployer sur l'écran au fond de la pièce. Un motif rappelle celui de l'ORTF. Redescendre au bord de la piste quand on sent que c'est possible. Danser. Assez rapidement, la Lorette nous informe qu'elle part chez l'habitant. Revenu de son dîner, Ig fait son apparition, splendide avec ses pecs toilettés et ses tétons percés. On croise Stéph de Fribourg. Toujours dans le même coin, le type sculptural, taillé à la hache, avec son tatouage biohazard, flanqué de son conjoint (systématiquement ravagés de tics au petit matin). Ils doivent être là chaque samedi, puisque je les croise à chaque fois... La soirée passe. Farci au cocktail G-bière, Danu dort debout sur la piste, dans un semi coma. Sans être molle, l'ambiance est neutre. Une soirée sans enjeux, une musique sans surprise, plus terreste qu'aérienne. Mais vers six heures, l'excellent Michael K. prend le relais et propulse (enfin!) les plus patients dans l'hyperespace. J'ai pris tout ce qui traînait au fond de mes poches, et j'ai même accepté les suppléments que l'on m'a gentiment proposés. A un moment, la musique devient une sculpture de cristal incrustée de métal, des tubes de vif argent. Je choisis de me promener en lévitation dans l'appartement de la place de l'Eglise, je retrouve tout. (Je pense: "Les images ne meurent jamais.") Sous mes paupières, un ballet rotatif de traits, de flèches, qui s'organisent et girent à une vitesse progressive pour finir par former un motif kaléidoscopique qui tient du cristal de neige, dans les tons clairs, verts, rouge pâle. Pendant un bref instant, la musique se traduit en visions d'une clarté saisissante.
Les danseurs se sont assis sur les podiums, la machine à vapeur siffle sur la piste quasi déserte. Il est temps de passer la porte. Dehors, le ciel est voilé mais l'air est doux.



[One pill makes you larger
And one pill makes you small

And you've just had some kind of mushroom
And your mind is moving slow
Go ask Alice - I think she'll know
When logic and proportion
Have fallen sloppy dead
Remember what the dormouse said:
"Feed your head"]
Jefferson Airplane - 1967



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